Nous marchons dans la rue mais nous ne sommes pas du tout là, nous mangeons avec un ami mais nous pensons sans cesse à autre chose, nous sommes dans la salle d’attente de l’hôpital mais nous abandonnons notre corps au profit d’élucubrations diverses. Nous pensons que notre corps est là donc que nous n’avons rien à faire pour cela. Qu’il est une évidence qui n’a pas besoin de nous, sauf pour le nourrir, le laver, le soigner de temps en temps… ou alors pour le transformer jusqu’à ce qu’il corresponde à notre vision de lui.
Prendre soin de soi
Notre corps est notre premier enfant, le premier être dont il nous est donné de prendre soin, le premier être que nous avons à accompagner, à considérer. Et pour cela, nous pouvons ré-apprendre à être sensible. Nous pouvons redécouvrir que nous avons un poids, un volume, une densité, une peau qui respire, une ouverture aux perceptions sensorielles infinie. Si je marche dans la rue en remettant du poids dans mes jambes, la vie m’apparaît différente. Si, pendant que je parle à mon enfant, je me rappelle à ma présence corporelle, je suis réellement avec lui et non dans mes pensées. Si lorsque je téléphone, je sens mon assise sur la chaise de bureau j’écoute mieux et je réponds plus justement.
En léger différé…
Vous est-il déjà arrivé de vous rappeler une chose gentille que vous a dite une amie, mais seulement quelques heures après ? Et soudain vous avez envie de la remercier mais c’est trop tard. Vous est-il déjà arrivé de ne pas remarquer sur le moment un geste attentionné qu’on a eu pour vous et qui pourtant vous aurait aidée si vous en aviez pris la mesure ? Vous est-il déjà arrivé de vous souvenir seulement après coup d’un appel à l’aide de votre enfant, auquel vous n’avez pas répondu ? Vous est-il déjà arrivé de réaliser plusieurs jours plus tard à quel point on vous a mal parlé au travail ?
Faire acte de présence
Pour ma part, cela m’est arrivé des centaines de fois, et cela m’arrive encore, dès que je manque d’attention, que je fais semblant d’être là — ironie de la langue, on appelle cela « faire acte de présence » — à chaque fois que je suis, en pensées, déjà ailleurs.
Penser ou sentir ?
Notre éducation a tellement privilégié la réflexion, l’intellect, l’apprentissage des savoirs au détriment de la présence corporelle, que nous subissons une désynchronisation quasi permanente entre le corps et l’esprit. Nous sommes déchirées. Nous croyons que l’esprit est la partie noble de notre être et que notre corps en est, au mieux, le support. Il nous semble donc tout à fait naturel que notre corps soit posé là, quelque part, et que notre esprit court où bon lui semble, c’est-à-dire n’importe où. Cet esprit qui ne cesse de gambader d’une idée à une autre, tandis que notre corps laissé à lui-même, essaye de suivre la course, sans trop savoir comment se comporter.
Tant de choses nous arrivent que nous ne vivons qu’en différé.
Laisser l’instant nous requérir
Il est pourtant impossible d’apprécier la vie si nous ne sommes pas vraiment là. Et que signifie être là ? C’est rassembler corps et esprit au même endroit, à savoir exactement là où l’on se trouve ! Reconnaître ma propre présence corporelle, cette faculté à laisser l’instant me requérir entièrement, m’a permis d’entrer de plain-pied dans ma vie au lieu de continuer à l’imaginer autrement qu’elle n’était. Entrer de tout mon corps dans l’existence m’offre l’heur de pouvoir la contempler, de sentir son rythme, sa texture.
Et ce faisant me permet d’agir et de changer ce qui doit être changé.
Merci tout simplement
Merci Marie-Pierre. J’espère que tout va bien pour vous. Tendres pensées de Paris.
Il y a un an aujourd’hui que nous nous rencontrions au Fort St André. Quel souvenir merveilleux! Quel chemin parcouru depuis ce jour grâce à tous vos enseignements ! Et merci pour toute cette présence depuis le début de la pandémie , votre aide fut extrêmement précieuse en cette période. Merci infiniment.
Alors souhaitons un bon anniversaire à notre rencontre ! C’est vrai que nous « retrouver » pendant le confinement et pouvoir ré-explorer la méditation au quotidien a été une vraie chance. À très bientôt Marie-Hélène.
Merveilleux article encore une fois qui fait particulièrement écho dans l’épreuve que je traverse et qui me met face à face avec l’interaction, la synchronisation ou bien la désolidarisation corps-esprit …
Un vrai champ d’investigation s’offre à moi ! Merci chère Marié Laurence.
Présence… Absence… Synchronisée… désynchronisée… la vie est un rythme qui peut tout accueillir et que l’on peut apprendre à suivre. Je pense fort à toi.